Cela fait plus de dix ans qu’aucun cas de vache folle n’avait été signalé en France. Le dernier cas en France d’ESB (encéphalopathie spongiforme bovine), son nom scientifique, datait de 2011. Mais début mars 2016, l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) a frappé un troupeau des Ardennes.
Rappel
Apparue au Royaume-Uni dans les années 80, l'ESB s'était étendue à de nombreux pays en Europe et dans le monde à cause de l'utilisation de farines animales contaminées. Suspectée d'être à l'origine du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob chez l'homme, elle avait suscité l'inquiétude des consommateurs et entraîné une grave crise dans la filière bovine.
Maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ), maladie de la vache folle, et son équivalent humain, le nouveau variant de la MCJ (nvMCJ), appartiennent à une famille de maladies neurodégénératives toutes mortelles, appelées encéphalopathies spongiformes transmissibles (EST). Toutes les encéphalopathies spongiformes donnent au cerveau une allure d'éponge (spongiose) et sont marquées par la présence d'une forme anormale d'une protéine dénommée prion. Les spécialistes sont certains d'avoir affaire à une maladie qui a franchi les barrières séparant les espèces, avec la quasi-certitude que sa transmission s'est faite via la chaîne alimentaire. Il n'existe ni vaccin ni traitement contre la forme humaine de l'ESB.
En octobre 2014, les professionnels français avaient obtenu la levée des tests de dépistage de l'ESB sur les animaux nés depuis 2002, considérés par la filière comme un frein à l'exportation. Ce dépistage avait été rendu obligatoire en 2001, en pleine épidémie et contraignait à retenir les carcasses 24 heures après abattage, le temps d'obtenir les résultats des analyses.
La France avait été requalifiée pays à "risque négligeable" pour l'ESB en mai 2015 par l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE), le dernier cas d'encéphalopathie spongiforme bovine remontant à avril 2004 dans l'Hexagone. Cette décision devait permettre de rouvrir les exportations vers de grands marchés internationaux. Ces derniers mois, l'Arabie saoudite, le Canada, Singapour, le Vietnam et l'Afrique du Sud avaient rouvert leurs portes aux exportations de viande bovine française. Mais plusieurs marchés majeurs restaient fermés, notamment le Brésil et la Chine.
Un cas de vache folle dans les Ardennes
Mardi 22 mars, le bruit se répand dans les médias qu'un cas d'ESB, la maladie de la vache folle, est suspecté dans un troupeau de salers à Givron dans les Ardennes. La suspicion a été établie le 17 mars par le laboratoire national de référence de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), grâce à des prélèvements réalisés sur un animal à l'équarrissage (un mode d'élimination réservé aux bêtes mortes dans les fermes, et donc non destinées à l'alimentation humaine).
Depuis octobre 2014 seuls les bovins âgés de plus de 12 ans susceptibles d'avoir ingéré des farines animales étaient soumis au test de dépistage, ainsi que ceux morts hors abattoir et envoyés à l'équarrissage et âgés de plus de 4 ans. Ce qui était apparemment le cas du bovin suspect.
Des prélèvements sont effectués sur l’animal mort et envoyés au laboratoire européen de référence (LRUE) en Grande-Bretagne pour déterminer si on se trouve dans un cas d'encéphalite spongiforme bovine (ESB). Dans l'attente l'éleveur a été prévenu et le troupeau mis sous surveillance à titre préventif par arrêté préfectoral, ce qui interdit tout mouvement des animaux concernés en dehors de l'exploitation, a indiqué le ministère.
La suspicion d’encéphalopathie spongiforme bovine est confirmée le jeudi 24 mars matin par le ministère de l’Agriculture. Le LRUE a rendu son verdict mercredi. Ce cas a été notifié à la Commission européenne et à l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE). Depuis 2015, trois cas d’ESB ont été détectés en Europe.
Les décisions de la préfecture
Afin de présenter les mesures de gestion qui seront mises en œuvre sur l’élevage, le préfet des Ardennes, Frédéric Périssat, a tenu une conférence de presse le 24 mars à la préfecture de Charleville.
Environ 60 vaches (sur 400) du troupeau de Givron vont être abattues par mesure de précaution mais l'abatage des génisses pleines pourra être différé. L'éleveur sera indemnisé a assuré le préfet.
Dans un autre temps, 40 bêtes du troupeau ont été exportées avant les résultats des analyses. Elles sont toujours recherchées et devront être tuées.
Enfin, une enquête épidémiologique est lancée pour déterminer l'origine du cas de vache folle.
Avant que ces décisions ne soient connues, des prélèvements complémentaires auprès des bêtes de l’exploitation, par les services vétérinaires, étaient en cours. Aussi, des patrouilles de gendarmerie étaient postées devant la ferme «pour garantir la sérénité des opérations» et repousser les médias, présents suite à la déclaration, mardi soir, d’une suspicion d’un cas de vache folle sur un animal né en 2011.
Que dit le vétérinaire ?
«Une enquête alimentaire va être réalisée ainsi qu’une expertise de la valeur des animaux qui vont être abattus. L’État se prononcera sur le chiffre d’indemnisation que proposeront les experts mandatés pour évaluer le préjudice, suite à l’abattage des vaches. 54 vaches seront abattues, ainsi qu’un taureau et un veau. Mais cela ne se fera pas avant la fin du mois avril, puisqu’il faut quatre à six semaines pour que les résultats des prélèvements ADN, réalisés mardi, soient obtenus», explique le vétérinaire de l’exploitation.
L’étude de l’alimentation des vaches devrait se faire fin avril, afin d’analyser la nourriture achetée les années concernées par l’enquête, soit «en 2010, 2011 et 2012», a indiqué le vétérinaire. L’expertise de la valeur du préjudice, suite à l’abattage futur des animaux, devrait se faire dans une quinzaine de jours.
Et le vétérinaire d’insister : «L’agriculteur n’y est pour rien. Et peu importe l’indemnisation fixée, le prix à payer est surtout psychologique Abattre une partie de son cheptel, c’est remettre en cause le travail de toute une vie».