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Sur le site du Conseil général des Ardennes, on peut lire : ‘‘Notre département bénéficiera à terme de 2 infrastructures de tout premier ordre. Le premier est actif depuis juin 2007 avec l'arrivée du TGV Est à Charleville-Mézières et Sedan. En 2016, les Ardennes profiteront de l'ouverture de la branche Ouest de la nouvelle autoroute ardennaise : l’A 304.

L'enjeu des infrastructures de transport pour les Ardennes est d'irriguer l'ensemble du territoire départemental de manière à faire bénéficier à l'ensemble du département des avantages économiques apportés par les liaisons nationales et internationales que constituent l’autoroute A 304 et le TGV Est.

En matière de réseau routier, l'objectif affiché par le Président du Conseil Général des Ardennes est de mailler notre territoire par un réseau routier qui placerait 95 % de la population à moins de 15 minutes de l'autoroute ardennaise.

La politique d'investissement routier du Conseil Général est ainsi tournée vers la réalisation, sur plusieurs décennies, du maillage viaire qui permettra d'atteindre ce niveau de service vers les usagers.’’

Histoire du Y ardennais

a304-la-nouvelle-autoroute-des-ardennes.jpgLe 27 décembre 1969, le préfet Brunon déclarait au journal Le Monde : «La Direction des Routes met à l’étude le projet d’une route à 4 voies qui rejoindrait Charleville à Givet  afin d’ancrer le département sur les autoroutes belges E9 et E40, ce qu nous mettrait en liaison autoroutière directe avec tout le réseau européen (…) La liaison Charleville-Reims à quatre voies sera réalisée en 1975».

Dans Ardenne économique n° 1 de 1973, le Directeur Départemental de l’Equipement évoque en détail les objectifs du 6ème plan qui tendaient à réaliser l’intégralité de la voie rapide à caractéristiques autoroutières Charleville-Sedan (future A 206).

Le 20 avril 1971, M. Lebon, député-maire de Charleville-Mézières rappelle au ministre de l'équipement et du logement la visite qu'il a faite dans les Ardennes et les audiences accordées à Paris à une délégation d'élus ardennais. Il lui demande s'il peut lui faire le point, à la date du 15 avril 1971, des différents problèmes alors traités concernant les infrastructures routières, à savoir : a)  aménagement de la liaison Reims à Charleville-Mézières ; b) reliquat des travaux de la voie rapide de Charleville-Mézières à Sedan ; c) participation de l'Etat dans la deuxième tranche de la voie rapide 1F. I.A.T. et T.S.1. R.l ; d) financement dès 1971 de la rocade de cantonnement de Charleville-Mézières ; e) étude dès 1971 de la liaison Charleville-Mézières, Lonny, Reims, Givet ; f) liaison Sedan-Bouillon avec le réseau routier belge.

Par décision du 28 juin 1982, le Conseil régional Champagne Ardenne inscrit dans ses axes prioritaires la liaison Epernay-Reims-Charleville-Mézières-Frontière belge par Gué d’Hossus et La Chapelle.

En 1988 s’ouvrent à la fois la déviation de Sedan et le doublement de la RN 58 à l'Est de Charleville

L’A 203 est la branche qui rencontre le moins de difficulté de réalisation. La déviation de Sedan est financée par le Contrat de plan Etat-région 1989-1993. La mise en 2 fois 2 voies de la RN 58 entre Sedan et La Chapelle est financée à 80 % par le Conseil général des Ardennes. Sa construction se termine en 1993. Initialement prévue pour rejoindre Metz, la liaison Sedan-Metz est restée dans les tiroirs.

Puis vient la mise en 2 fois 2 voies de la RN 51 entre Reims et Charleville-Mézières. Les travaux sont en voie d’être terminés avec la mise en service de l’échangeur de Cormontreuil. Mais elle ne porte le nom de A 34 que sur certaines portions. L’autoroute A 34, relie Reims à Charleville-Mézières et à Sedan (par l'A203, devenue A 34). L'autoroute se prolonge vers la frontière belge, puis Bouillon en direction de Liège, l'Allemagne et les Pays-Bas. Elle fait partie de la route européenne 46.

Une mise aux normes autoroutières des RN 43, RN 58 et RN 1043 aux abords de Charleville-Mézières et de Sedan sont prévues. Une mise aux normes autoroutières est en cours de la RN 244 sur le barreau est de Reims et de la RN 51 entre Caurel et le nord de Rethel (suite à l'achèvement de l'échangeur de Cormontreuil).

L’autoroute A34 va être complétée par la branche "Ouest" du "Y ardennais" entre Charleville-Mézières et Gué-d'Hossus (frontière belge) : à noter que, juste avant celle-ci, le contournement de Rocroi est déjà fait (été 1996 pour la partie au sud est, 1998 au nord). Ce projet de portée européenne s’inscrit par conséquent sur une grande liaison autoroutière Charleroi-Charleville-Mézières-Reims. Elle reliera Reims et le sud-est de la France à Charleroi, Bruxelles et Rotterdam. Cette autoroute sera dénommée A 304. Les premières études remontent à 1990.

L’A 304

Benoît Huré, Président du Conseil général, déclarait dans Les Ardennes en Marche de janvier 2013 : ‘‘Pour le département, cette autoroute signifie se voir remettre sur les grands axes de circulation Nord-Sud Est-Ouest, position qui fera des Ardennes un carrefour de communication. Les axes de communication ne suffisent pas pour le développement économique, sauf qu’ils sont indispensables. (…)

L’A 304 va nous rapprocher de l’Europe du Nord, de ses grands bassins économiques, principalement ceux qui sont autour des ports maritimes. On sera à moins de 2h30 par camion des ports d’Anvers ou de Zeebrugge, où transitent avec Rotterdam plus de 60% de la logistique maritime mondiale. Il est donc utile que nous nous rapprochions de ces bassins très riches, très denses en population, et qui sont saturés. Il n’y a plus d’espace physique de développement économique dans ces territoires. Et il n’y a plus non plus la capacité à recruter la main d’œuvre nécessaire pour accompagner les développements économiques potentiels. Plus nous serons près d’eux, plus nous pourrons accueillir ces développements qui ne peuvent plus se faire chez eux. Avec l’A 34, on était accroché au réseau autoroutier français, bientôt nous serons accrochés aux réseaux nord-européens’’

Ce projet possède sa continuité en Belgique par l’aménagement programmée de la RN 5 en autoroute (itinéraire E420) sur 64 km. Une partie importante de l’itinéraire en Belgique est déjà aménagée à 2 fois 2 voies. Le maillon projeté entre Charleville-Mézières et la frontière répondrait à plusieurs fonctions :

-    A l’échelle européenne, l’aménagement, permettra la constitution d’un axe européen Nord-Sud de grande qualité permettant un délestage des A1 et A31 actuellement saturées. Il raccourcira notamment la liaison Lyon-Bruxelles mais reliera également la région parisienne à la Belgique.

-    A l’échelle transfrontalière, cet aménagement contribuera à une double ouverture : de la Wallonie vers la France et de la Champagne-Ardenne vers la Belgique et les Pays-Bas. Il mettra Bruxelles et Anvers à moins de 2 heures de Charleville-Mézières et Charleroi à environ 2 heures de Reims.

-    A l'échelle locale, l’aménagement autoroutier facilitera les échanges internes au département des Ardennes, notamment en désenclavant la pointe nord du département. Il améliorera les conditions de sécurité et contribuera à la réduction de la circulation dans la traversée de Charleville-Mézières.

Les travaux débutent en 2011. Deux phases sont prévues. Phase 1 (2011-2014) : des travaux de construction de l’A 304 consacrée uniquement aux chantiers de terrassement. En langage technique, on parle de TOARC : Terrassements, Ouvrages d’Art, Rétablissements de Chaussées (toutes les voies transversales qui sont interceptées dans le cadre des travaux de l’autoroute doivent être rétablies). Phase 2 des travaux (2015-2016) : construction des chaussées, mise en place des équipements de sécurité, aménagements paysagers, construction des bâtiments des 2 aires de repos, remise en état des RN 51 et 43.

Mais d’année en année, le budget de l’A304 augmente. Le président du conseil général évoque une facture de 450 millions d’euros. L’État parle de 430. Pour mémoire, le coût initial, le 5 juillet 2007, était de 330 millions.

La facture s’établit ainsi : 55 % pour l’État (263,5 millions), 28,33 % pour la Région (121,8 millions) et 16,67 % pour le Département (71,68 millions). Et la, on arrive à 457 millons, soit plus que les 2 estimations.

A cela, il faudrait ajouter pour le département les 20 millions qu'il versera pour construire le barreau de raccordement de Charleville, les 22 millions versés par sa collectivité pour le tronçon Rocroi – Gué-d’Hossus, et les 3,5 que devrait lui coûter la portion entre Gué-d’Hossus et la Belgique. Ce qui ferait passer la part du département à plus de 117 millions...

Pour le président du conseil général, "Dix millions d’investissements publics, c’est du travail pour 250 personnes pendant un an". Ses services ont recensé 100 personnes œuvrant sur le chantier en 2011, 340 en 2013. Les travaux mobilisent 52 sous-traitants, dont dix entreprises de la région.

Une facture qui risque encore d'augmenter... «Quand on lance des travaux de cette importance, on se fie d’abord à des ordres de grandeur, comme le prix au kilomètre, mais cela reste une estimation sommaire. Il a fallu ensuite tenir compte de l’évolution des réglementations environnementales, de la loi sur l’eau, de l’augmentation du prix des matières premières, etc. On s’est aperçu aussi que le tracé emprunte des sols de mauvaise qualité, des zones très humides, voire marécageuses». Qui a fait les analyses de sol dans les études ?

La décision du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et l’arrêt des travaux

Le 11 février 2014, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne annuleA 304 Zone humide l’arrêté préfectoral de 2011 engageant les travaux. Et ceci au nom de la loi sur l’eau. Depuis 2008, la loi Grenelle prévoit qu’en cas de destruction de zones humides, il faut en recréer 2 à 5 fois plus ailleurs pour compenser les pertes. Cette compensation était prévue dans le projet de l’A 304, mais a été jugée insuffisante.

France Nature Environnement a en effet contesté devant cette instance le non-respect des règles de compensations des zones humides, appelées à être détruites pendant le chantier. FNE dénonce le fait que le chantier ait commencé alors que ces compensations n’avaient pas été fixées, contrairement à ce que la loi impose. Autrement dit : l’État, à travers la Dreal (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement, maître d’œuvre du chantier), n’a pas respecté sa propre réglementation. «L’A 304 n’est qu’un exemple parmi d’autres de la non-application de la réglementation par l’État. Cette autoroute, la plus chère au kilomètre, impacte fortement des zones naturelles. Le tracé retenu détruit ainsi 200 hectares de zones humides, entraîne la dérivation définitive de dix cours d’eau et le bétonnage de 17 rivières (…). Face à ces impacts conséquents sur l’eau et la biodiversité, il était attendu de la part de l’État qu’il corrige les effets délétères de cette infrastructure. Malheureusement, les mesures compensatoires ont été tout simplement oubliées de l’arrêté d’autorisation du préfet, alors qu’elles devraient en toute logique précéder les actions de destructions». Pour rappel, ces zones humides se trouvent dans le nouveau parc régional. Une étude du commissariat général au développement durable montre que les fonctions des zones humides (…) pour éviter les crues ont un prix. Elle chiffre entre 2 et 7 millions d’euros les pertes de bénéfices causées par la destruction de 100 hectares.

Présent lors de l’assemblée générale de la chambre de commerce et d’industrie, Frédéric Perissat, nouveau préfet des Ardennes, déclare : «Selon le juge, les répercussions environnementales du chantier étant insuffisamment qualifiées, le chantier doit être suspendu. Il nous faut donc trouver les mesures à prendre pour redémarrer les travaux».  «Nous privilégions deux hypothèses : d’une part faire un recours. Nous travaillons juridiquement sur cette hypothèse. D’autre part, déposer un nouveau dossier concernant la loi sur l’eau, qui doit nous permettre de sécuriser définitivement cet aspect du chantier. Tous les grands dossiers en cours font l’objet de ce type de recours». Quitte à aller à l’encontre du jugement du tribunal, le préfet insiste sur un point : «On ne peut pas arrêter ce chantier du jour au lendemain, compte tenu de son importance, des mesures de sécurité à prendre ou d’opérations complexes en cours».

Lors de la réunion des cofinanceurs (État Région, Département) en préfecture de Région (Châlons-en-Champagne), ceux-ci décident de lancer une enquête publique, ce qui prendra de 9 à 10 mois. La DREAL serait donc en mesure, d’ici au 15 mars 2014, de déposer un nouveau dossier de demande d’autorisation au titre de la loi sur l’eau pour régulariser la situation et répondre aux attentes exprimées dans le jugement du tribunal.

Le préfet des Ardennes a pris un arrêté mettant en oeuvre la décision du tribunal administratif et prescrivant, à titre conservatoire, des travaux imposés par les enjeux de préservation de la sécurité des biens, des personnes, et de l’environnement, compte tenu de l’état d’avancement des différents lots de l’opération. 

Pour le ministre des transports, ‘‘L’essentiel est de ne pas retarder les travaux. Très vite, je pense qu’un arrêté transitoire permettra de corriger une partie des défauts qui ont fait l’objet du recours et ont justifié la décision du tribunal. Je pense possible, je dis même nécessaire de tenir le calendrier pour une livraison fin 2016, début 2017. On va faire face, on va aller vite. C’est une maîtrise d’ouvrage publique. L’État assumera ses responsabilités mais il s’agit pour l’heure de trouver une solution juridique afin, encore une fois, de ne pas perdre trop de temps. Tous les services concernés sont à pied d’oeuvre.’’

L’arrêt pourrait coûter très cher. Selon  un professionnel du BTP, «On va peut-être se retrouver en situation d’arrêt forcé, sans que la responsabilité des entreprises soit engagée. Dans ce cas, tous les moyens humains et techniques déployés sont compensés : l’État paie les frais engagés. Avec un chantier de cette ampleur, cela peut atteindre trois à quatre millions d’euros par mois.». En attendant de Rocroi à Charleville-Mézières, hôteliers et restaurateurs subissent un manque à gagner.

TGV et ligne Charleville-Givet

sncf-ter-tgv.jpgDepuis 2007, Rethel, Sedan et Charleville-Mézières peuvent s’enorgueillir d’avoir le TGV à raison d’au moins 1 liaison aller-retour jusqu’à Paris. La convention de réalisation et de financement de la première phase du TGV Est a été signée le 7 novembre 2000 par l’Etat, RFF, la SNCF et l’ensemble des collectivités territoriales. La participation globale du Département a avoisiné les 12 millions d’euros. Sans que la ligne soit Reims-Sedan soit modifiée… Mais pour pouvoir dire que l’on accueille le TGV, juste pour le fun, pour dire qu’on est à moins de 1,5 h ou 2 h de Paris…

Et pendant ce temps la, les infrastructures de la ligne Charleville-Givet se dégradaient… A certains endroits, les rames progressent à 10 km/h au lieu de 100 km/h. Le temps du trajet avoisine parfois 1 h 30 au lieu d'une heure, voire de 45 minutes.

Dans un courrier du 19 avril 2013 à destination du maire d'Aubrives, le ministre des Transports annonce que la rénovation de la ligne Givet-Charleville n'est pas prioritaire. En effet, le ministre informe que le gouvernement a décidé de se concentrer sur le réseau principal.

«L'actualisation de l'audit de l'école polytechnique de Lausanne (EPFL) a mis en lumière le bilan positif des efforts de renouvellement déjà engagés tout en montrant qu'ils devaient être poursuivis notamment sur le réseau principal. Ce dernier accueillant la très grande majorité des circulations et compte tenu de la contrainte budgétaire, c'est sur ce réseau que le gouvernement a demandé à RFF de concentrer ses efforts. La ligne Charleville-Givet ne fait pas partie de ce réseau principal malgré le trafic qu'elle supporte».

De plus le ministre parle de la nécessité d'une participation financière des collectivités territoriales intéressées sans laquelle «la mise en place rapide d'un plan de régénération de cette voie est très peu probable».

La mise en conformité de cette ligne est évaluée à 139 millions d'euros.

Depuis, la situation n’a pas évolué. Le nombre de voyageurs serait passé de 800 000 à 700 000 par an…

En guise de conclusion

Une étude de l'ADEME estime que le trafic automobile va diminuer de 20% dans les années à venir, entre autre à cause de l'augmentation du prix des carburants. N'aurait-il pas été plus judicieux de mettre cet argent dans la réfection de la ligne ferroviaire entre Charleville et Givet ?

Y ardennais, A 304, vrai-faux TGV... : ces réalisations, votées sans concertation avec les populations, sont ruineuses pour les finances locales... et pour quels résultats ?

Ces 3 équipements ont 2 points communs :

1) l'autoroute Reims-Charleville, le TGV et l'A 304 ont été cofinancés par les collectivités locales et régionales, et non pas par l'Etat seul : c'est une première en France ! Depuis 30 ans, le discours dominant des "décideurs" a prêché la doctrine du "désenclavement" des Ardennes, garant (?) de l'avenir du développement économique ....pour faire payer les seuls contribuables ardennais au mépris de la solidarité nationale !

2) Force est de constater l'échec total de cette doctrine : ces infrastructures n'ont créé ni emplois, ni rebond industriel ...pire, les délocalisations se sont accentuées et l'arrivée du faux TGV a fait exploser les tarifs SNCF tout en réduisant le nombre de liaisons ferroviaires ! ... alors que les 700 000 usagers annuels de la ligne Charleville-Givet attendent toujours la rénovation d'un réseau qui leur est utile quotidiennement (et qui coûterait 4 fois moins cher que l'A 304 !).

Autrement dit, cette doctrine du "désenclavement" a servi à faire croire au bon peuple ardennais qu'il existerait des solutions locales au dépérissement du territoire : un trompe l'œil politique !

Confondre l'intérêt général, l'intérêt électoral et les intérêts privés de quelques uns, telle est l'imposture du soi disant "désenclavement" ...un concept qui n'est pas propre aux Ardennes !

Décidemment, il est urgent que les citoyens se réapproprient la politique dans les Ardennes, comme partout en France et en Europe ...

Ceux qui vivent sont ceux qui luttent !

Février 2014

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