C'était il y a presque trente ans. La politique volontariste du ministère de la Culture d'alors avait permis de sauver le cinéma français, tant au niveau de la création que par la sauvegarde d'une multitude de salles de cinéma de centre-ville, condamnées à disparaître. L'Eden à Romilly fut, à cet égard, un exemple du succès de cette politique.
Trente ans plus tard, le scénario n'est plus tout à fait le même. «Tournant le dos à cette orientation dans le seul but de satisfaire les intérêts commerciaux d'un entrepreneur privé soucieux de ses seuls intérêts, les élus ont décidé de rayer d'un trait de plume trente ans d'actions culturelles et sociales au centre de la cité en fermant l'Eden, seul cinéma d'art et d'essai de l'Aube, regrette le président de l'association. Le ministère de la Culture qui a tant fait pour permettre la renaissance de l'Eden ne pouvait être laissé dans l'ignorance de ce choix absurde».
Dans une lettre adressée voici quelques jours à Aurélie Filippetti, le président de l'association rappelle que le cinéma concerné est un établissement historique, inauguré en 1913 et réhabilité en cinéma trois salles en 1984. «Il était depuis lors géré par une association qui y diffusait une programmation diversifiée de qualité avec de nombreux films récents, souvent en sortie nationale, voire en avant-première. On aurait pu continuer sur cette lancée sans le projet de la communauté de communes, soutenue par la Ville qui en a la présidence, de favoriser l'installation d'un cinéma multiplexe privé sur une zone commerciale périphérique, dont les aménageurs ont subordonné la réalisation à la fermeture du cinéma de centre-ville. Ce projet, déjà souhaité par les aménageurs privés de la zone commerciale au cours de la mandature précédente, mais écarté par les élus d'alors, a refait surface avec l'appui des élus de l'actuelle mandature dans des conditions juridiques contestables. Cela fait d'ailleurs l'objet d'un examen particulier susceptible de déboucher sur une procédure de contestation devant le tribunal administratif».
L'association parle d' un «sabordage» quand elle évoque la décision prise par la Ville de lui supprimer sa subvention annuelle d'équilibre. Elle dénonce une atteinte faite à une qualité de programmation «qui risque de se trouver fortement altérée par les objectifs purement commerciaux d'un multiplexe au seul profit des films à forte rentabilité. La disparition du cinéma au cœur de la cité ne ferait qu'accélérer le déclin du centre-ville au profit d'une périphérie qui n'a pas besoin d'un multiplexe pour être naturellement attractive».