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8 novembre 2014 6 08 /11 /novembre /2014 13:42

Une centaine d’ouvriers de Petitjean étaient présents, hier matin, au tribunal de grande instance de Troyes, pour suivre des plaidoiries cruciales pour l’avenir du fabricant dryat de mâts d’éclairage. Au menu : la demande du comité d’entreprise (CE) d’annuler, pour absence de motif économique, la procédure de licenciement collective concernant 129 salariés.

«La reprise de Petitjean par le groupe saoudien Al Babtain, le 31 janvier 2012, a permis de préserver 459 emplois sur les 500», rappelle l’avocat du CE. Pour autant, «la première volonté du groupe saoudien a été de décapiter tout le comité de direction dès février 2014 en nommant des patrons intérimaires».

Mais ces intérimaires-là coûtent cher : «1,6 M€ d’honoraires auxquels s’ajoute l’expertise du cabinet Berger pour 1 M€» Tout cela débouche en juin dernier par l’annonce d’une restructuration musclée avec 129 licenciements et une réorganisation en cinq sociétés, assimilée par l’avocat à un «dépeçage. On retire de Petitjean les terrains et l’immobilier, les brevets et les marques, la force de vente et la galvanisation la plus moderne d’Europe. Que va-t-il rester ? Des vieilles machines et des salariés dont personne ne voudra ». Il précise que le plan social a été construit sur des comptes 2013 que les commissaires ont refusé de certifier. Ce qui a conduit le CE à demander et obtenir du tribunal de commerce la nomination d’un expert. « Vous avez déjà vu un dossier où le comité d’entreprise demande une expertise de gestion ? C’est très rare».

Plus grave encore : le plan social n’a pas de cause économique : «On le sait depuis l’arrêt de la Cour de cassation : la cause économique s’apprécie sur le périmètre du secteur d’activité du groupe, pas sur celui de l’entreprise. Et le résultat opérationnel du groupe saoudien a été multiplié par dix entre 2012 et 2013. Al Babtain a distribué 85 % de son résultat en 2013. Comment fait-on pour distribuer ainsi 65 M€ aux actionnaires et licencier en même temps 129 ouvriers ? Alors, on a peur de votre décision, tellement peur qu’on vous dit : Vous n’êtes pas compétente ».

La récente loi sur la sécurisation de l’emploi ne change rien. «La loi n’a pas confié à la Direccte l’appréciation de la cause économique. Et la cour d’appel de Versailles, dans le dossier Heinz, a souligné que l’autorité administrative n’était pas compétente pour apprécier le périmètre et le bien-fondé d’un plan social. Quant au conseil des prud’hommes, il juge seulement les litiges individuels. Vous êtes les seuls à pouvoir le faire. Avec le dossier Sodimédical, vous avez été la première en France, renchérit l’avocat, à vous reconnaître compétente et à annuler le plan social car son motif économique était inexistant ».

Pour l’avocat d’Al-Babtain France, la cause économique du plan social est hors sujet : « Vous devez vous déclarer incompétent au profit du tribunal administratif. La Direccte est en train d’étudier ce plan social pour l’homologuer ou pas. C’est une décision administrative qui se conteste devant le tribunal administratif. Mon confrère fait une manipulation remarquable en vous invitant à prendre le maquis judiciaire. Je ne sais pas si c’est vraiment le rôle d’un juge d’enfiler le costume du chef d’entreprise et de juger avant les licenciements la justification de ces licenciements. Les causes du licenciement se jugent a posteriori, et c’est le conseil des prud’hommes».

Mise en délibéré, la décision sera rendue vendredi 14 novembre.

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