«Ils sont rémunérés 360 euros pour neuf jours de vendange avec une grande amplitude horaire». Les 226 vendangeurs doivent donc se contenter d'un Smic polonais (4 fois plus bas qu'en France) quand d'autres intérimaires sont payés plus du double sans tenir compte des heures supplémentaires. La comparaison n'est pas abusive puisqu'elle s'appuie sur les salaires versés à d'autres travailleurs polonais venus dans des conditions similaires. C'est-à-dire avec transport, hébergement, restauration et traducteurs en sus.
A la louche, on peut estimer que la SAV Polska économise allègrement 100 000 euros pour une campagne de seulement neuf jours. A cela, il faut ajouter les charges sociales dont personne n'a vu la couleur en Pologne et en France et qui se montent à près de 40 000 euros.
L'affaire est d'autant plus juteuse que les enquêteurs établissent que le système perdure depuis trois saisons. Ce qui fait un gain total d'environ 500 000 euros, sachant par ailleurs que les concurrents ne travaillent pas pour des clopinettes.
SAV Polska est comme de bien entendu au cœur de la tourmente. «Cette société, qui fonctionne comme une agence d'emploi, ne dispose plus d'agrément administratif depuis novembre 2008. Elle ne respecte donc pas la réglementation polonaise». Il n'y a pas l'ombre d'un salarié qui effectue des travaux agricoles pour son compte là-bas. Ce qui constitue une obligation légale. «Les locaux sont manifestement fermés et ils sont injoignables au téléphone».
Si bien que sur place, à Bartoszyce, les contrôleurs se sont cassés le nez sur la porte. La SAV Polska et son armée de saisonniers ne sont pas davantage répertoriées sur le territoire national. Parce qu'ils ne bénéficient pas de certificat d'hébergement ni de déclaration de détachement de salariés. En conséquence, les cotisations sociales passent à la trappe.
Évidemment, les quelque dix-sept viticulteurs chez qui Hervé Lapoulle déposait ses saisonniers ne manqueront pas d'être interrogés. Inutile de dire qu'ils feront l'autruche quand bien même ils ont l'obligation de vérifier de manière formelle que le prestataire de service est dans les clous.
Presta-Vitivigne, créée en juin 2011, emploie quelque 148 saisonniers de façon régulière.