Il avait saisi le conseil de prud’hommes d’Épernay pour réclamer le versement de primes et commissions auxquelles il estimait avoir droit. Un contentieux technique, sans relief particulier, qui vient de prendre une autre tournure devant la chambre sociale de la cour d’appel de Reims.
Déclarant subir un «harcèlement moral» depuis qu’il a engagé cette procédure, un ex-salarié de la coopérative du syndicat général des vignerons (CSGV), basée à Cumières, a vu la cour reconnaître l’existence de tels faits.
Il fut embauché en 2007 par la Sarl France-Tourbe – filiale aujourd’hui dissoute de la CSGV – pour fabriquer et commercialiser des pesticides. Début 2010, il portait devant les prud’hommes le litige lié aux primes et commissions.
Depuis, les relations avec la direction générale de la CSGV «se sont progressivement détériorées. Il se présente comme victime de harcèlement : humiliations publiques, reproches injustifiés, attaques personnelles, représailles continuelles, lieu de travail inspecté… À ceci s’ajoutent des conditions physiques de travail difficiles (exposition aux produits utilisés, absence d’aération suffisante…)», mentionne le compte rendu d’un psychologue du travail daté de février 2013.
Déboutés par les prud’hommes fin 2010, il faisait appel en ajoutant à leur demande la «résiliation judiciaire» du contrat de travail, c’est-à-dire une rupture par annulation qui produit les mêmes effets qu’un «licenciement sans cause réelle et sérieuse». Tombé en dépression, puis en arrêt maladie depuis février 2013, le salarié faisait effectivement savoir qu’il n’était plus question pour lui de travailler à la CSGV.
Si la cour d’appel l’a débouté sur la quasi-totalité de ses prétentions liées aux primes et commissions, il a en revanche obtenu gain de cause sur sa demande de résiliation judiciaire. «Monsieur X a mis en exergue des manquements suffisamment graves de la CSGV à ses obligations qui le rendent recevable à solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail. Que cette demande s’avère de plus fort justifiée alors que le salarié contribue suffisamment à établir, sans que la CSGV ne prouve utilement le contraire, qu’à compter de la présente procédure, il a subi des agissements répétés de harcèlement moral susceptibles de dégrader ses conditions de travail, non sans risque d’altérer sa santé. C’est le harcèlement ci-avant caractérisé qui a eu raison de son intérêt et de son implication pour ses fonctions, le conduisant à former une demande de résiliation seulement en cause d’appel».
Pour la CSGV, la somme à payer du fait de la résiliation est d’environ 100 000 euros. L’affaire se poursuit désormais sur un plan pénal. Une plainte a été déposée par l’ex-salarié, un procès-verbal pour «harcèlement moral» transmis fin 2013 au parquet de Châlons-en-Champagne par l’inspection du travail. L’enquête est en cours à la gendarmerie d’Épernay.