Sur les 56 réacteurs en exploitation, 29 étaient à l’arrêt le 16 mai 2022. En cause, des mises à l’arrêt prévues de longue date, notamment pour effectuer les examens nécessaires à la prolongation de la durée de vie des réacteurs au-delà de quarante ans, mais aussi un phénomène inattendu et encore largement inexpliqué de corrosion sur des tuyauteries.
C’est d’abord à Civaux 1 (Vienne) en octobre 2021 lors de contrôles faits durant sa visite décennale que les fissures ont été découvertes. Puis sur Civaux 2, sur Chooz 2 (Ardennes) et sur Penly 1 (Manche). Le 15 décembre 2021, EDF indique dans un communiqué avoir détecté, lors de la deuxième visite décennale du réacteur n°1 de Civaux, un endommagement de l’acier inoxydable d’une portion de tuyauterie sur les lignes du circuit d’injection de sécurité (RIS). Les contrôles par ultrasons réalisés sur ce circuit ont mis en évidence des défauts à proximité de deux soudures situées en amont et en aval d’un coude sur les quatre lignes que comporte le circuit d’injection de sécurité. Aucun défaut n’avait été identifié lors des contrôles réalisés lors de la première décennale en 2011. EDF a procédé à la découpe des portions de tuyauteries concernées et les expertises, réalisées en laboratoire, ont permis de confirmer que les défauts constatés sur le réacteur de Civaux 1 sont liés à un mécanisme de dégradation qui fait intervenir simultanément le matériau et ses caractéristiques intrinsèques, les sollicitations mécaniques auxquelles il est soumis et la nature du fluide qui y circule. Ce communiqué se termine par un calendrier prévisionnel de reconnexion au niveau électrique de réacteurs, tout en indiquant que la durée des arrêts des réacteurs de Civaux 1 et 2, Chooz 1 et 2, Penly 1 est susceptible d’être prolongée en fonction des résultats des contrôles et des travaux qui seront à réaliser.
Dans un communiqué du 16/12/2021, l’IRSN indique qu’une anomalie générique relative aux réacteurs de 1450 MWe ne pouvant, à ce stade, être exclue, EDF a décidé la mise à l’arrêt préventive des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Chooz B dans les Ardennes à partir du 16 décembre, qui sont de même type que ceux de Civaux (réacteurs de 1450 MWe), afin de procéder à des contrôles. Le communiqué se termine sur le fait que des actions de contrôle pourraient s’avérer nécessaires sur les autres réacteurs en exploitation.
Le 16 décembre 2021, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) annonce la détection d'un phénomène de corrosion sur le circuit d'injection de sécurité du réacteur 1 de la centrale de Civaux (Vienne). Le réacteur de 1 450 mégawatts (MW) ainsi que les trois autres du même pallier N4, Civaux 2 et Chooz B1 et B2 (Ardennes), ont été mis à l'arrêt pour la réalisation de contrôles.
Plusieurs fissures importantes sont alors décelées, notamment une de taille encore jamais vue à Penly 1, sur une conduite d’urgence du circuit d’injection de sécurité – ce système de sauvegarde permet d’injecter de l’eau dans le circuit primaire principal pour refroidir le cœur du réacteur en cas d’accident. Il s’agit du même phénomène de «corrosion sous contrainte», identifié depuis octobre 2021 d’abord à Civaux, puis sur plusieurs sites, mais qui générait jusqu’ici de plus petites fissures et sur d’autres zones de ces tuyauteries. En l’occurrence, cette fissure d’une profondeur inédite se trouvait sur une tuyauterie ayant fait l’objet de réparations particulières au moment de la construction de la centrale dans les années 1980. D’autres fissures dites «de fatigue thermique» avaient par ailleurs été repérées sur des conduites d’urgence «considérées comme sensibles à la corrosion sous contrainte» à Penly 2 et Cattenom 3.
«Les analyses réalisées depuis plus d’un an ont permis à EDF d’identifier les réacteurs dont les lignes des circuits d’injection de sécurité sont les plus sensibles au développement du phénomène de corrosion sous contrainte» (CSC), indiquait EDF dans une note d’information : «il s’agit des 16 réacteurs les plus récents». Le problème de fissures ne concerne donc pas que les 1450 MWe, mis en service entre 1996 et 1999, mais aussi les 1300 MWe, qui sont un peu moins récents. Ils sont 20 au total sur toute la France : 2 à Penly, 2 à Flamanville et 4 à Paluel (Normandie), 2 à Belleville (Centre- Val de Loire), 4 à Cattenom et 2 à Nogent (Grand Est), 2 à Glofech (Occitanie), 2 à Saint-Alban (Auvergne - Rhône Alpes). Quatre réacteurs du «palier N4» sont Civaux 1 et 2, sur lesquels les travaux étaient terminés, et Chooz 1 et 2, où ils étaient en cours. Restaient 12 réacteurs de 1 300 MW dits de type «P’4», sur lesquels EDF décidait des réparations «préventives», sans même passer par le stade de l’examen, ce qui implique un arrêt de 160 jours. Fin décembre 2022, sur ces douze réacteurs, un était déjà réparé et les cinq autres étaient en cours d’opération. Il en restait donc six à réparer d’office au cours de l’année 2023 (Belleville 1, Belleville 2, Cattenom 2, Golfech 2, Nogent 1, Nogent 2), alors qu’EDF y prévoyait jusqu’à présent seulement des contrôles dans un premier temps.
Les réacteurs B1 de la centrale nucléaire de Chooz est donc mis à l'arrêt le 16 décembre 2021, le B2 le sera le 18 janvier 2022. Des contrôles seront réalisés, en complément des derniers effectués, en 2019 et en 2020, lors de leur visite décennale.
L’unité de production n°2 de la centrale de Chooz a été reconnectée au réseau électrique le mercredi 8 février à 11h33. Alors qu’elle poursuivait sa montée en puissance progressive, les mécanismes automatiques de protection du réacteur se sont activés le jeudi 9 février à 15h17, suite à un défaut sur une alimentation électrique, conduisant à l’arrêt automatique de l’installation. Cet arrêt a eu un impact sur des tuyauteries du circuit de production de vapeur situées en salle des machines, dans la partie non nucléaire du site. Les équipes de la centrale procèdent à des contrôles sur ces tuyauteries. Le recouplage est désormais fixé au vendredi 18 mars. Sauf que, une nouvelle fois, la grève contre la réforme des retraites devrait contrarier les aspirations d’EDF. «La reconnexion au réseau électrique initialement prévue le 28 février 2023 a été replanifiée au 4 avril. Les dernières expertises sur le phénomène de corrosion sous contrainte ayant conduit à décider du remplacement d’un tronçon de tuyauterie supplémentaire.» Il n’en sera rien car les grévistes en ont décidé autrement. Ils réclament le retrait de la réforme des retraites voulue par le gouvernement. Deux jours plus tard, la centrale annonçait un nouveau report, mais cette fois pour les deux réacteurs. Deux jours pour l’unité de production nº2, dont la date était fixée au lundi 6 «afin de réaliser les dernières opérations de redémarrage». De nouvelles dates sont annoncées par EDF pour un retour en production. «L’unité 2 devrait être de retour sur le réseau le 16 avril et le réacteur 1 le 26 avril», lance le service communication du centre nucléaire de production d’électricité de Chooz.
Après plus d'un an d'arrêt, la centrale nucléaire de Chooz (Ardennes) produit à nouveau de l'électricité. L'un des deux réacteurs, à savoir le B2, a de nouveau atteint sa pleine puissance ce mercredi 19 avril 2023. L'indiscrétion a été révélée par France Bleu, peu avant l'envoi d'un communiqué aux rédactions par la société Éléctricité de France (EDF). L'officialisation a eu lieu en début d'après-midi. Le réacteur B2 a été rebranché le samedi 15 avril à 20h22 précises. Il aura fallu quatre jours pour que la puissance maximale soit à nouveau atteinte, ce mercredi 19 à 12h20.
Concernant le réacteur B1, "les travaux [...] sont terminés et les opérations de redémarrage se poursuivent", mais aucune date précise n'a été fournie. La centrale nucléaire de Chooz, particulièrement puissante, produit 3,8 % de l'électricité française depuis 1997.
PS : Des personnels américains étaient mobilisés pour travailler sur le remontage des tuyauteries. Des soudeurs dont la mission était de réparer les dégâts liés au phénomène de corrosion sous contrainte. Ils ont alors pallié la pénurie de soudeurs, quand cette branche était fortement sollicitée par le parc nucléaire français. D’après le magazine Marianne, dans un article en ligne du 4 mars, «15, puis 30 soudeurs aux mains d’or, américains ou canadiens» ont été appelés en renfort. Cette équipe a empoché «au moins deux à trois fois le salaire d’un soudeur très qualifié, lequel perçoit plus de 3 000 € par mois et des frais de déplacement».