En 2012, pendant l’entre-deux tours de l’élection présidentielle, François Hollande s’engage à fermer une centrale nucléaire à la fin du quinquennat en cas d’élection : «Fessenheim, c’est la plus vieille de France et elle se trouve sur une zone sismique».
En septembre 2015, Ségolène Royal conditionne la fermeture de Fessenheim. La ministre de l’Ecologie annonce lors d’une visite à Strasbourg. «Quand Flamanville ouvrira, Fessenheim devra fermer. Donc Flamanville va ouvrir d’ici à 2018. Et donc en effet, Fessenheim devra fermer». «C’est lamentable. Il y en a marre des "faux-culs"», enrageait un porte-parole du Réseau Sortir du nucléaire après l'annonce de la ministre de l'Ecologie.
Le 6 mars 2016, Emmanuelle Cosse affirme lors d’un entretien au «Grand Jury» RTL-Le Figaro-LCI : «La centrale sera fermée en 2016. Le calendrier [de fermeture], c’est celui que m’a répété à plusieurs reprises le président de la République, c’est 2016».
Le 7 mars 2016, Eric Straumann, président du conseil départemental du Haut-Rhin et Michel Habig, président de la CLIS (Commission Locale d’Information et de Surveillance de la centrale) demandent au Premier ministre la position officielle du Gouvernement sur la fermeture ou non de Fessenheim.
Le 16 juin 2016, sur Europe 1, la ministre de l'Environnement tente de remettre la pression: «Le décret d’arrêt de fonctionnement de Fessenheim doit être pris avant la fin de cette année, donc le processus doit être tenu et il n’y a aucune raison qu’il ne le soit pas».
Le conseil d’administration d’EDF a approuvé le 24 janvier contre plusieurs garanties le protocole d’indemnisation du groupe préalable à la fermeture anticipée de Fessenheim en 2018... Mais la date précise fera l’objet d’une prochaine convocation du CA.
Mais qu’a décidé ce conseil d’administration d’EDF où le représentant de l'Etat et les cinq administrateurs proposés par l'Etat n’ont pas pris part au vote, sur la convention d'indemnisation, étant juges et parties. Le conseil d'administration d'EDF a donné son feu vert sur le protocole d'indemnisation du groupe par l'Etat. Il s'agit de la première étape pour enclencher le processus de fermeture anticipée du site. L'entreprise doit ensuite demander l'abrogation du décret d'autorisation de fonctionnement des deux réacteurs.
«490 millions d’euros avec une prévision de versement de 20% en 2019 et 80% en 2021». Pour s'assurer du vote positif des indépendants, deux conditions doivent être assurées par l'électricien en contrepartie du feu vert donné au protocole d'indemnisation.
Elles concernent, tout d'abord, «la prolongation» de l'autorisation de création de l'EPR en construction à Flamanville (Manche), qui arrive à échéance le 11 avril prochain alors que le réacteur ne doit pas entrer en service avant la fin 2018 du fait des retards sur le chantier. En 2015, EDF a officiellement demandé une prolongation de 36 mois, jusqu'au 11 avril 2020.
En outre, EDF aurait obtenu l'assurance de pouvoir redémarrer le réacteur n°2 de la centrale de Paluel (Seine-Maritime), à l'arrêt depuis mai 2015. Or la loi sur la transition énergétique prévoit qu'un réacteur à l'arrêt depuis plus de deux ans, soit considéré comme étant en arrêt «définitif», mais le gouvernement a la possibilité de proroger de trois ans cette durée. Or l'électricien ne prévoit pas de terminer les opérations de maintenance sur ce réacteur, où un générateur de vapeur a chuté en mars 2016, avant la fin novembre 2017. Donc EDF doit demander une dérogation pour ce réacteur.
"Je salue la décision équilibrée du conseil d'administration d'EDF qui va permettre de nouveaux investissements industriels franco-allemands sur le territoire du Haut-Rhin. La ministre chargée de l'Energie donnera suite positivement aux demandes que le conseil d'administration vient d'exprimer", indique la ministre de l'Environnement "Elle va permettre le maintien de l'emploi et la mutation du site puisque de toute façon, l'autorisation de fonctionner de Fessenheim n'était valide que jusqu'au 31 décembre 2022".
Quoi qu'il advienne, l'avenir de la centrale alsacienne est encore loin d'être acté.
EDF attend le feu vert de l'Union européenne pour pouvoir se restructurer. L'entreprise attend notamment que la Commission accepte que l'Etat participe à hauteur de 3 milliards d'euros à l'augmentation de capital de 4 milliards qui devrait être lancée prochainement. Si l'exécutif européen ne juge pas conforme ce protocole de refinancement à la législation sur les aides d'Etat, EDF ne demandera pas l'arrêt de Fessenheim.
En tout état de cause, le feuilleton Fessenheim continue car les mesures réclamées par les administrateurs d'EDF ne trouveront pas leurs applications avant la fin de la mandature de François Hollande. C'est donc le prochain gouvernement qui sera chargé de trancher l'avenir de la centrale. Les élections présidentielles et législatives pourraient donc rebattre les cartes. Michelle Rivasi, eurodéputée EELV, ne se fait guère d'illusion : l'engagement de François Hollande "pourrait malheureusement finir en renoncement puisque cette fermeture trop tardive pourrait permettre à l'opposition de relancer la centrale après une longue procédure". François Fillon a d'ores et déjà annoncé qu'il souhaitait stopper la fermeture de la centrale de Fessenheim. Le candidat Les Républicains souhaite "consolider" une filière qu'il considère être un des fleurons de l'industrie française. De même, Marine Le Pen "ne compte pas abandonner le nucléaire, bien au contraire". La candidate du Front national propose de le moderniser et le sécuriser. A l'opposé, Jean-Luc Mélenchon propose la fermeture immédiate de Fessenheim (Alsace). Le candidat du mouvement "La France insoumise" vise 100 % d'énergies renouvelables d'ici 2050. Même objectif 100 % renouvelables pour Yannick Jadot, le candidat d'EELV, le parti qui avait obtenu cet engagement du Président de la République en amont de son élection.
"C'est aussi un choix positif pour l'entreprise", qui pourra ainsi favoriser ses investissements dans les énergies renouvelables en conformité avec la loi de transition énergétique. "C'est la meilleure décision pour que l'entreprise rationalise ses investissements et respecte la loi de transition énergétique". Parmi les pistes de reconversion du site, la ministre de l'Environnement et de l'Energie a évoqué l'éventuelle installation d'une usine de voitures électriques Tesla, un projet d'usine de batteries de troisième génération ou encore la création d'un site pilote de démantèlement de centrales. Elle a dit avoir pris contact avec le ministre allemand de l'Economie.
Ce choix proposé par Ségolène Royal d'implanter une usine Tesla à Fessenheim et une usine de batteries de troisième génération est paradoxal, car les voitures électriques à batteries fonctionnent en France essentiellement grâce au nucléaire. En réalité, elle propose de supprimer une centrale nucléaire, tout en augmentant la demande en électricité nucléaire. Absurde, n'est-il pas ? D’autant plus que les voitures électriques à hydrogène commencent à se multiplier avec une autonomie plus grande…
Tout ceci prouve que l’éco-capitalisme a de beaux jours devant lui…