Sur les 148 salariés mis à la porte le 22 avril 2011, lorsqu'Ideal Standard a fermé Porcher, 124 ont décidé
de se battre en justice. Parmi eux, seuls 22 ont retrouvé un emploi en CDI et trois ont créé leur entreprise.
La salle du conseil de Prud'hommes de Charleville n'étant pas assez grande pour accueillir tout le monde,
le procès tant attendu a lieu au TGI, dans le cadre de ce qu'on appelle une «audience foraine».
Cette audience vise à faire reconnaître deux fautes : primo un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
secundo un «préjudice d'anxiété» liée à l'amiante.
Dans le premier cas, l'employeur «a manqué à son obligation de reclassement». En clair, il aurait
fallu proposer des postes aux salariés dans l'ensemble du groupe ISI (11 000 salariés dans le monde, dont ceux d'Ideal Standard), et couvrant tout le secteur d'activité du groupe. Au lieu de ça,
sept postes seulement ont été proposés en France, et 33 en Europe (sur 4 400), tous requérant un haut niveau d'études, et tous destinés à ne produire qu'une seule catégorie de produits (la
céramique).
Ensuite il y a eu «violation de l'ordre des départs». Par exemple : «Pour le personnel cadre,
a été prise en compte l'ancienneté du salarié, et pour le personnel non cadre a été pris en considération le niveau de qualification […]. Le choix des salariés à licencier n'a pu qu'être entaché
d'irrégularités».
Le second motif de plainte des salariés concerne l'amiante. Entre 2008 et 2010, trois d'entre eux sont
tombés malades à cause d'elle. Tous les autres ont peur. «Alors que l'entreprise a tout fait pour empêcher une expertise des lieux, l'administration du travail, lorsqu'elle s'est enfin rendue
sur place en 2011 et 2012, a rédigé un rapport édifiant : il y avait de l'amiante partout et tous les salariés ont été exposés. Le rapport a clairement pointé la «carence de l'entreprise» sur ce
sujet».
Pour le licenciement économique sans cause réelle et sérieuse, leur avocat demande entre 12 et 48 mois de
salaires en fonction de l'ancienneté et de la difficulté à retrouver un emploi. Pour la violation de l'ordre des départs, deux ans de salaires. Et 30 000 euros pour le préjudice d'anxiété.
Le délibéré a été fixé au 25 juin.